Diabète : Mesure et complications
Rappel des différents diabètes
Diabète de type I
Le diabète de type I (autrefois appelé diabète insulino- dépendant) touche 2,5 % de la population diabétique française. C’est une maladie auto-immune aboutissant à la destruction des cellules β des ilots de Langerhans du pancréas par les lymphocytes T. Les premiers symptômes apparaissent lorsque 80 à 90 % des cellules β ont été détruites. Il survient chez l’enfant ou l’adulte jeune. Malgré le recours à des injections sous-cutanées d’insuline pluriquotidiennes et des consignes hygiénodiététiques stricts, l’évolution de la maladie est inévitable, aboutissant à la destruction totale des cellules β et donc à l’effondrement de la production d’insuline. De nombreux espoirs thérapeutiques, comme la greffe de cellules d’ilots pancréatiques ou l’élaboration d’un vaccin diminuant la réponse immunitaire, sont en cours d’évaluation. L’objectif est de retarder au maximum la survenue des complications dégénératives du diabète.
Diabète de type II
Le diabète de type II, quatrième cause de mortalité dans le monde, représente 90 % des cas de diabète en France. Il se caractérise par une insuffisance de sécrétion d’insuline (et non une absence) ou par une insensibilité des récepteurs de l’insuline entraînant une réduction des effets de l’insuline sur les cellules cibles (insulinorésistance). Il survient généralement après 40 ans et est souvent associé à une surcharge pondérale. Une reprise de l’activité physique associée à un régime alimentaire équilibré peut stabiliser les glycémies. Un traitement par anti-diabétiques oraux est souvent mis en place. Lorsque celui-ci ne suffit plus à équilibrer correctement les glycémies, on parle de diabète insulino-requérant, aussi appelé diabète insulino-nécessitant, qui requiert une insulinothérapie.
La mesure de la glycémie
Une glycémie normale à jeun se situe entre 0,8 g/l et 1,2 g/l et de multiples dispositifs existent pour mesurer la glycémie. Le plus fiable reste la prise de sang veineux sur tube spécifique (bloquant la glycolyse), réalisé au laboratoire. Toutefois, il faut acheminer le tube rapidement (risque d’hémolyse).
La mesure capillaire ou « hémoglucotest (HGT) » ou « dextro » est une technique de lecture instantanée de la glycémie après recueil d’une goutte de sang à l’extrémité d’un doigt (le pouce et l’index seront évités).
Les résultats peuvent être altérés en cas de :
- état de choc, oedèmes, utilisation de vasopresseurs, hypothermie (vasoconstriction périphérique) ;
- si les bandelettes sont altérées ou périmées ;
- d’utilisation d’alcool pour désinfecter la peau avant la ponction car cela dénature l’enzyme contenue dans la bandelette et fausse les résultats.
Il existe un dispositif non invasif par ultrasons (capteur ou bracelet) qui permet une surveillance continue ou intermittente de la glycémie couplée dans un avenir proche à une administration d’insuline transdermique. Le coût reste très élevé et quelques limites altèrent les résultats (irritation de la peau, sudation, mouvement de la main).
Le capteur de glucose ou holter glycémique est composé d’une électrode implantée en sous-cutané au niveau péri-ombilical et mesure la concentration de glucose dans le liquide interstitiel à intervalles de quelques secondes. Il permet un enregistrement continu sur deux à trois jours et possède de nombreux avantages : dépistage des épisodes d’hypoglycémie nocturnes, détermination du créneau horaire le plus favorable à l’auto surveillance… Il peut être couplé à une pompe à insuline.
Enfin, un dernier dispositif est en cours de validation : un détecteur de glucose est placé dans la veine cave supérieure et est relié à une pompe implantable délivrant l’insuline par voie péritonéale de manière continue en fonction du taux instantané de la glycémie. Nouvel outil dans l’approche du patient diabétique (type 1), les indications seront nombreuses et cette technique devrait se répandre dans la plupart des services de diabétologie.
Complications à moyen et long terme
La surveillance et la prise en charge des patients diabétiques est étroitement liée à la survenue des complications dégénératives du diabète.
L’hyperglycémie affaiblit les parois des petits (microangiopathie) et gros (macroangiopathie) vaisseaux sanguins qui approvisionnent les tissus en oxygène et en éléments nutritifs. Trois types de complications peuvent en résulter :
- néphropathie diabétique : l’atteinte des vaisseaux glomérulaires du rein responsable de l’élimination des toxines et déchets du sang entraîne une insuffisance rénale à long terme évoluant vers la dialyse, voire de la greffe ;
- rétinopathie diabétique : complication fréquente, elle correspond à l’atteinte des capillaires de la rétine par des micro-occlusions entraînant une ischémie de zones de la rétine (troubles oculaires, cécité) ;
- artériopathie par athérosclérose entraînant une insuffisance coronaire, artérite oblitérante des membres inférieurs, obstruction carotidienne.
Le diabète favorise les neuropathies. Elles apparaissent sous différentes formes et découlent d’une mauvaise circulation sanguine (apport d’oxygène insuffisant pour les nerfs) et du taux élevé de glucose altérant la structure des nerfs. Il peut s’agir de :
- mononévrite : atteinte d’un nerf (cruralgie, facialgie) ;
- polyneuropathie distale et symétrique des membres inférieurs et plus particulièrement du pied entraînant une perte de sensibilité ou, au contraire, une hyperesthésie (nocturne). Tout traumatisme doit retenir l’attention du diabétique car cela constitue une porte d’entrée aux microbes (mal perforant plantaire pouvant évoluer jusqu’à l’ostéite) ;
- neuropathie diabétique : dégénérescence de certaines fibres du système nerveux autonome affectant certaines fonctions de l’organisme :
- atteinte de la régulation de la pression artérielle (hypotension orthostatique) ;
- atteinte de la régulation du rythme cardiaque (tachycardie y compris au repos) ;
- atteinte du système digestif et urinaire : gastroparésie (retard de vidange gastrique), diarrhées chroniques, troubles mictionnelles.
La survenue et la gravité des complications sont majorées par des pathologies préexistantes telles que l’hypertension artérielle, le surpoids, le tabac, l’hypercholestérolémie… Enfin le patient diabétique est très sensible aux infections (urinaire, dermatologique) parfois difficiles à traiter et surtout très longues à guérir du fait du ralentissement du processus de cicatrisation.
D'un point de vue pratique
• 1 g/l - 5.5 mmol/l.
• Intérêt du dosage de l’hémoglobine glyquée HbA1c : c’est le reflet de l’historique glycémique des 120 derniers jours (5,5-6 %) qui est proportionnel à la concentration et la stabilité de glucose. L’évolution annuelle de ces valeurs présage des risques cardio-vasculaires à long terme.
• Devant tout malaise, une glycémie capillaire doit absolument être réalisée. L’hypoglycémie tue encore de nos jours. Tout trouble neurologique appelle un dextro !
• En plus de la mesure de la glycémie, un électrocardiogramme doit être systématiquement réalisé chez tout patient diabétique présentant un malaise car il existe un risque majeur infarctus du myocarde silencieux (la perception de la douleur est perturbée chez le diabétique).
• Tout patient diabétique devant subir une intervention chirurgicale est programmé en première position. Généralement il sera perfusé avec un sérum physiologique et un G5 % en Y (se rapporter aux prescriptions médicales) et une glycémie capillaire sera réalisée avant son arrivée au bloc opératoire et notée sur la feuille de transmission.
• L’installation du patient diabétique alité doit être rigoureuse du fait des risques d’escarres longs à cicatriser, couplés à un risque majeur de surinfection.
• Face à la prédisposition à l’infection, toute porte d’entrée (voie veineuse périphérique, sonde urinaire) sera retirée dès que possible.
Article écrit par Laurence Piquard (IDE Anesthesiste) et paru dans ActuSoins magazine, num 26